Groupes sanguins, moteur caché des progrès chirurgicaux et urgences vitales

par | Sep 21, 2025 | Santé

Le mot-clé principal : groupes sanguins.
En 2023, près de 112 millions de dons de sang ont été recensés par l’OMS, mais 40 % proviennent de pays riches représentant seulement 16 % de la population mondiale. Dans les hôpitaux français, trois poches sur dix sont utilisées pour des urgences obstétricales. Ça surprend. Parce qu’aux yeux du grand public, les transfusions restent liées aux accidents de la route. Et pourtant, derrière chaque poche, un code A, B, AB ou O décide du sort du patient.

Groupes sanguins, pierre angulaire de la médecine moderne

Découvert en 1901 par Karl Landsteiner à Vienne, le système ABO a bouleversé la chirurgie. Avant, la mortalité post-transfusion dépassait 50 %. Après, elle chute sous 10 % en moins de vingt ans (données croisées Johns Hopkins, 1921). Aujourd’hui, quatre systèmes dominent la scène clinique :

  • ABO : A, B, AB, O
  • Rhésus : Rh + ou Rh –
  • Kell : K ou k (Kell négatif)
  • Duffy : Fy(a) ou Fy(b), critique en Afrique face au paludisme

En France, selon l’Établissement français du sang (EFS, rapport 2024), la répartition est stable :

  • O + : 36 %
  • A + : 37 %
  • B + : 9 %
  • AB + : 3 %
  • Rh – toutes catégories : 15 %

Chiffres bruts, mais enjeux majeurs. Un stock trop faible en O – pénalise les blocs opératoires, car ce type est donneur universel. À l’inverse, AB + reçoit tous les autres, mais ne peut quasiment rien offrir. D’un côté, une polyvalence salvatrice ; de l’autre, une dépendance chronique.

Pourquoi existe-t-il plusieurs groupes sanguins ?

Question fréquente sur les forums de bio. La réponse mêle évolution, immunité et pure loterie génétique.

Pression infectieuse

Les travaux de l’équipe de Simon Blair (Harvard, revue Nature 2022) montrent que le parasite du choléra adhère moins aux parois intestinales des porteurs du groupe O. En revanche, ces mêmes personnes saignent plus longtemps lors de traumatismes graves. Sélection naturelle, compromis permanent.

Migration et brassage

Les cartes génétiques mondiales retracent les grandes routes humaines. A et B dominent en Asie, O règne sur le continent américain, fruit d’un effet fondateur précolombien. L’East London Gene Project (2021) confirme : au sein d’une même rue, la fréquence du Rh – varie de 2 % à 20 % selon l’origine familiale. Fascinant.

Réponse utilisateur : « Qu’est-ce que le facteur Rhésus ? »

Le Rhésus correspond à une protéine (antigène D) à la surface des globules rouges. Rh + : antigène présent. Rh – : absent. Pour la grossesse, la distinction est vitale. Une mère Rh – portant un fœtus Rh + développe des anticorps. Sans injection d’immunoglobulines dans les 72 heures suivant l’accouchement, la seconde grossesse risque une anémie fatale pour l’enfant. Les maternités de Lille à Marseille appliquent ce protocole depuis 1968 ; la mortalité néonatale liée au Rh a chuté de 98 %.

Avancées 2024 : vers une pénurie zéro ?

Le rêve : produire un sang universel. Plusieurs pistes émergent.

Enzymes « gommeuses » d’antigènes

L’université de Copenhague a isolé en 2024 une enzyme intestinale capable d’effacer les antigènes A et B en 15 minutes. Premier essai clinique prévu à Toronto fin 2025. Cela rappelle les toiles d’Andy Warhol : même support, couleurs différentes, impact identique.

Culture de globules rouges in vitro

Le consortium britannique RESTORE a obtenu en novembre 2023 une transfusion de 20 millilitres de globules cultivés en laboratoire. Durée de vie dans l’organisme : 33 jours, contre 25 jours pour un don classique. Si la production passe à l’échelle, la course aux donneurs rares (Bombay, Diego, etc.) pourrait s’apaiser.

Intelligence artificielle et gestion des stocks

À Lyon, l’algorithme PRISM (Hospices civils, 2024) analyse flux, épidémies et calendriers scolaires pour prédire les besoins 15 jours à l’avance. Résultat : gaspillage réduit de 23 % lors de l’épisode caniculaire de juin 2024. La data au service de l’hémoglobine.

Implications génétiques et pistes futures

Les groupes sanguins ne servent pas qu’aux transfusions. Ils éclairent l’oncologie, la psychiatrie et la nutrition.

  • Cancers digestifs : une méta-analyse de l’INSERM (2023) associe le groupe A à un risque accru de cancer gastrique (+11 %).
  • Covid-19 : l’étude paneuropéenne COVID-Gene (2022) suggère une protection relative pour O, mais débat ouvert.
  • Maladies cardiovasculaires : la cohorte EPIC-Norfolk montre un taux de thrombose 1,4 fois supérieur chez AB.

D’un côté, ces corrélations nourrissent l’espoir d’une médecine personnalisée. Mais de l’autre, elles risquent de glisser vers une « hémotypologie » simpliste, façon horoscope sanguin. Je me souviens d’un patient, service d’hématologie à Bordeaux : convaincu que son groupe B le protégeait du diabète, il négligeait ses contrôles glycémiques. Résultat : complications rétiniennes. Le sang ne dicte pas tout.

Connexions transversales à explorer

  • Microbiote intestinal et antigènes A / B
  • Impact de la nutrition sur l’expression des gènes du Rh
  • Compatibilité entre vaccination mRNA et variants peu connus du système Kidd

Autant de sujets que je décortiquerai prochainement.


Je l’avoue, chaque fois que je tends mon bras pour un don, je repense à Landsteiner, à l’EFS de la rue de Charonne, et à ce son ténu du sang qui file dans la poche. Si ces lignes vous ont éclairé, gardez l’élan : vérifiez votre carte de donneur, partagez l’info autour d’un café ou d’un podcast, et retrouvons-nous bientôt pour d’autres aventures moléculaires.

Emilie Boujut

Emilie Boujut

Autrice de CRJE

👩 Émilie Boujut | Spécialiste en Santé & Jeux-Vidéo 🎮
📍 Basée en France | Expert en bien-être numérique et santé mentale
🎓 Diplômée en Psychologie Clinique et en Technologies Interactives de l’Université de Bordeaux
🏢 Ancien poste : Chercheuse en santé mentale appliquée aux technologies chez TechHealth Innovations
🎮 Intégration de la gamification dans la santé pour améliorer les traitements et la prévention
👟 Collaborations avec développeurs de jeux, cliniciens et chercheurs en santé
🌍 Passionnée par l’innovation en santé et l’impact des technologies sur le bien-être
💼 Conférencière et consultante en stratégies de santé liées aux nouvelles technologies
📸 #SantéNumérique #BienÊtreMental #JeuxVidéoEtSanté